Coups de Coeur




Ils ne sont pas seulement des interprètes, ils inventent, ils écrivent… Julie Deliquet

Tryptique Julie Deliquet Idiot ! Parce que... Corbeaux ! Nos fusils sont chargés ! La Mégère Apprivoisée Autres actualités





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Lagarce

DERNIERS REMORDS AVANT L'OUBLI
Jean-Luc Lagarce



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NOUS SOMMES SEULS MAINTENANT
Création collective

Noce1

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Collectif
In Vitro

Julie Deliquet
Tryptique
"Des années 70 à nos jours"
Julie


À l'issue de sa formation au Conservatoire de Montpellier puis à l'École du Studio Théâtre d'Asnières, elle poursuit sa formation pendant deux ans à l'École internationale Jacques Lecoq. Elle crée le Collectif In Vitro en 2009 et présente Derniers Remords avant l'oubli de Jean-Luc Lagarce (1er volet du Triptyque Des années 70 à nos jours...) dans le cadre du concours Jeunes metteurs en scène du Théâtre 13, elle y reçoit le prix du public. En 2011, elle crée La Noce de Brecht (2e volet du Triptyque), au Théâtre de Vanves, présenté en 2013 au 104 dans le cadre du festival Impatience. En 2013, elle crée Nous sommes seuls maintenant, création collective (3e volet du Triptyque).
Depuis 2010, elle enseigne à l'École d'Art dramatique de Champigny-sur-Marne.
Le collectif est associé au Théâtre Gérard Philipe, centre dramatique national de Saint-Denis depuis janvier 2014.




Noce


Lagarce

Seuls



FAMILLES, ENCORE ET TOUJOURS
D'une génération à l'autre, passant par Brecht et Jean-Luc Lagarce, jusqu'aux échos de mai 68, le collectif In Vitro secoue les ombres et les non-dits des relations familiales, en un triptyque qui parcourt le temps avec une réconfortante vitalité.
Quand on se marie chez Brecht – même revu au goût des années 1970 – on n'est pas forcément à la noce. Dans le cas présent, entre les aveux de la mariée enceinte, les mauvaises plaisanteries des uns et des autres, tout se déglingue, et pas seulement les chaises fabriquées par le marié. Une génération plus tard, chez Jean-Luc Lagarce, les mariages sont loin, les familles se recomposent, se retrouvent pour des questions de maison à vendre. Mais les intérêts divergent, les non-dits et les rancunes remontent. Et l'on se re-sépare comme si de rien n'était : Derniers remords avant l'oubli . Génération suivante, sous l'oeil de leurs enfants de 20 ans, la réunion de famille une fois de plus tourne à l'aigre, pour cause de points de vue opposés sur le quotidien, les projets et, c'est nouveau, ce qui se passe dans le monde. Nous sommes seuls maintenant proclame le Collectif In Vitro, qui parcourt le temps et son héritage avec une vitalité réconfortante, une impitoyable sensibilité. Et une réjouissante maîtrise théâtrale dans ce triptyque, à voir dans son ensemble (ce n'est pas un marathon) comme une saga.



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La table se prête bien aux réglements de comptes, et sur le thème du repas de famille qui dégénère, théâtre et cinéma ont volontiers brodé. La table familiale est au centre du projet en trois parties que présentent Julie Deliquet et le collectif In Vitro, invités du Festival d’Automne et nouveaux venus dans le paysage théâtral (lire Libération du 16 septembre).La soirée en leur compagnie dure plus de quatre heures qu’on ne sent pas passer. Sens du rythme et maîtrise du temps ne sont pas les moindres qualités d’un spectacle aussi drôle que réfléchi.









LA SAGA DES FAMILLES

À travers La Noce, Derniers remords avant l'oubli, Nous sommes seuls maintenant , en famille, Julie Deliquet et le Collectif In Vitro parcourent le temps, depuis les années 1970.
Au commencement était La Noce. Celle de petits bourgeois en entraînés par Brecht dans un maelström burlesque autant qu'impitoyable, qui fait exploser les hypocrisies, déglingue les relations convenues, casse les meubles autant que les certitudes…
Mais quoi, il faut bien vivre, alors on continue.
On continue, et nous voilà face à la génération suivante, chez Jean-Luc Lagarce. De nouveau en famille. Plus précisément une famille d'amis, deux hommes et une femme. Suffisamment liés pour, ensemble, avoir acheté une maison où ils ont vécu de beaux jours. Et puis le temps passe, s'en est venue la lassitude, le besoin d'autre chose. La femme et l'un des hommes sont partis vivre de leur côté. L'autre homme est resté, seul. Et puis voilà que la maison doit être vendue. Donc, les autres arrivent avec leurs conjoints respectifs. Les retrouvailles sont amères, les vieilles rancoeurs s'entremêlent au désir de retrouver quelque chose d'avant. L'ambiance, pourtant, est totalement opposée à celle de La Noce. Nous sommes chez Jean-Luc Lagarce, en un monde où l'impossible à dire passe par la grâce d'un langage délicieusement ironique, tendrement implacable. Derniers remords avant l'oubli, le titre donne le ton.
En fait, c'est par cette pièce que Julie Deliquet et le collectif In Vitro ont commencé le travail sur le triptyque. Pour la raison que tous sont trentenaires, et que pour eux, Lagarce appartient à la génération de leurs parents, qui avaient vingt ans dans les années 1970/1980 et dont ils voudraient tant comprendre les rêves, les motivations. « Ce que, dans ces années d'utopie, ils cherchaient à conquérir, ce qu'ils nous ont légué, et que nous voudrions maintenir. »
Est alors venu le désir de connaître également ce dont ces mêmes parents ont hérité. Remontant le temps, Julie Deliquet a lu des dizaines et des dizaines de textes avant de découvrir cette Noce insensée, écrite par un tout jeune Brecht en pleine révolte familiale, et c'est ce qui l'a séduite. C'est l'opposition entre la brutale folie de l'un et la subtile détresse de l'autre qui a retenu son intérêt et celui du Collectif.
Ils ont travaillé selon leur méthode, c'est-à-dire ensemble. Car si Julie Deliquet fantasme sur les années 1970, ce n'est pas pour retrouver l'éblouissante théâtralité dont le langage, sous le "règne du metteur en scène " pouvait passer par les somptueux éclairages, les trouvailles scénographiques, les audaces dramaturgiques, entre autres.
Elle, compte sur l'essentiel : la puissance de l'acteur en prise directe avec les mots.
Donc, pour La Noce comme pour Derniers remords avant l'oubli, chacun s'est emparé des répliques, des personnages, est passé de l'un à l'autre avant de s'engager en un seul, a improvisé à partir des situations, avant de revenir à la base. « Jour après jour je les suivais, je prenais des notes, nous en discutions, leur avis est essentiel. Ils ne sont pas seulement des interprètes, ils inventent, ils écrivent ce qu'ils ressentent, et nous utilisons les enrichissements apportés par ce travail au texte initial. » Celui offert aux spectateurs car de toute façon, le style et le talent d'un auteur comme Lagarce sont irremplaçables.
De même pour La Noce, dans la mesure où la pièce est trop bien construite pour la bousculer.
« Mais il y a des variantes. Une façon de ne pas forcément prendre chaque soir la même place, de ne pas forcément adresser les mêmes mots à la même personne. Sans rien changer à la pièce, puisque de toute façon, tous les personnages sont tout le temps présents sur scène, écoutent, réagissent. Une façon, de ne pas donner chaque soir
exactement la même représentation. » C'est également ce qui se passe avec Nous sommes seuls maintenant, création absolue du Collectif. Le travail a été le même, mais à partir d'un thème, de situations, d'improvisations, aboutissant à ce que Julie Deliquet appelle « l'écriture de plateau ». Le thème : les relations familiales, toujours. La situation : les héritiers des années 1970/1980, devenus à leur tour parents d'une fille de 20 ans. Ils ont atteint un âge où il serait normal de rentrer dans le rang, comme dirait Lagarce, mais eux veulent commencer une autre vie. En l'occurrence, à la campagne. Ils achètent une maison dans les Deux Sèvres où ils convoquent parents et amis. Les
voilà tous autour d'une table, se portant des toasts, évoquant un avenir de rêves écologiques, un passé guerrier, avec un vieux copain argentin qui les a accompagnés dans leur combat contre la dictature chilienne.
Mais qu'y a-t-il d'authentiquement sincère dans ces utopies militantes ? Qu'y a-t-il de sincèrement authentique dans des projets d'avenir, conformes, eux aussi, à l'air du temps ? La question reste posée.
Colette Godard, in Théâtre de la Ville


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Vincent Macaigne D'après L'Idiot de Dostoïecski



 

 

 

 

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Vincent Macaigne a déjà monté L'Idiot de Dostoïevski en 2009, sous le titre Idiot !. Cétait un grand bazar viscéral, qui a marqué les esprits. Comme sa mise en scène de Hamlet, Au moins j'aurai laissé un beau cadavre à Avignon en 2011 a marqué les esprits, par son excès, son style gore et surtout par sa justesse.
Il revient aujourd'hui au Prince Mychkine de Dostoïevski et à son incroyable naïveté, il revient à cette formidable inadaptation à la vie, pour créer : Idiot ! parce que nous aurions dû nous aimer. Le point d'excla mation reste; s'ajoute au titre dans sa deuxième
version, l'idée d'être aimé.
Le théâtre de Macaigne, metteur en scène qui s'approprie, avec humour, les classiques par la violence, est défini par le le cri et la souillure. Il explique : « Le cri vient au fil des répétitions. Il n'est pas là au début.
C'est une pensée forte. Ce qui se passe, c'est que l'acteur doit défendre à la fois la parole de l'auteur, celle du metteur en scène et la sienne. Il y a de quoi crier. Le rapport au jeu que je cherche est comme un accélérateur d'énergie. Le cri vient par urgence à dire. Donc ce n'estpas hystérique. »

 



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Le metteur en scène a adapté les 1000 pages du roman russe. Il dispose d'un livret de scène qui ramène les quatre parties du roman à deux sections dramatiques. Le roman est donc toujours présent. Mais letravail consiste à trouver un endroit de liberté et de risque pour créer une oeuvre scénique qui partage la rage de Dostoïevski, plutôt qu'à assurer un pur respect littéraire, bien que les grandes lignes du roman soient respectées. L'équipe veut faire du plateau le lieu de sa lecture de L'Idiot, de la puissance et de la violence de sa fable et de ses personnages. Il y a là quelque chose d'allemand dans la liberté d'adaptation au théâtre. Une énergie, un flux scénique qui s'arrogent le droit de prendre la littérature comme un matériau. Une désacralisation du livre qui transforme le plateau en une carrière à ciel ouvert où le travail se fait.
«Ce qui nous intéresse ? La naïveté, la bonté du Prince, mais aussi le monde dans lequel il évolue, un monde féroce, cynique, où se mêlent sans hiérarchie le beau et le laid, le mesquin et le sublime, le sang et le rire. Un
rapport idiot au monde est-il possible aujourd'hui ?».
Partant de ce tragique ancien, Vincent Macaigne veut puiser également dans des images de notre monde. Il y a dans ce projet comme la suite synthétique des derniers projets scéniques de Vincent Macaigne : le cri funèbre et grotesque de Friche, le cri d'amour de Manque, et le cri sanglant de Requiem. Avec toujours cette idée de ramener acteurs et spectateurs au concret de leur présent partagé, et de travailler sur l'accident comme effet de réel créateur d'histoires.




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ÉTAT SAUVAGE

Vincent Macaigne renoue avec l'ironie et la fureur
du monde dostoïevskien.


Le roman de Dostoïevski, qui met en scène l'errance et les erreurs d'un jeune homme a priori privilégié, occupe l'esprit de vincent Macaigne. Déjà en 2009, avec son équipe, il donne vie au prince Mychkine, aux amours condamnées de ce personnage hors norme, naïf, inadapté à la sauvagerie d'une société « aux valeurs floues… installée et aristocratique, aux prises avec des changements idéologiques qu'elle ne maîtrise pas », écrit-il alors. C'est toujours ainsi qu'aujourd'hui, dans la rage et la douleur, dans l'ironie et la fureur, il retrouve le prince et son univers. On n'a jamais fini d'explorer le monde dostoïevskien. Et puisque la reconstitution historique s'avère inutile, le théâtre étant là pour faire vivre spectacle et spectateurs dans un même temps, un même présent, on peut se fier à Vincent Macaigne pour tout simplement nous plonger au coeur du désordre et de la passion, dans l'énormité de la folie humaine. Chez lui, qu'il s'agisse de violence, de complicité, de beauté, de rires ou de larmes, le summum est une loi.

Colette Godard



Extraits du spectacle vu des coulisses

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Un théâtre de la démesure

Vincent Macaigne : Je trouve que le théâtre, à certains moments,
s'est un peu trop restreint, que le théâtre public est là aussi pour faire de grands tours de magie. On pourrait avoir une discussion de politique culturelle sur ce sujet. Il est fondamental, pour moi, de défendre cette idée, de dire que l'on peut faire de grands spectacles où il y ait une forme de magie, de démesure.
Cela demande beaucoup d'énergie, beaucoup d'efforts, ce n'est pas un caprice d'enfant gâté. Au Théâtre de la Ville, il y a plein de spectacles qui racontent ça. Je trouve très important que les gens voient quelque chose d'exceptionnel. Je pense que, quand on fait un spectacle, on le fait pour être plus grand que soi-même, y mettre plus de vie, être en état de « sur-vie ». Lorsque je fais un spectacle, j'essaye d'ouvrir mes bras, comme un besoin d'étreinte.
Cette étreinte-là, elle peut paraître dégoûtante à certains, mais c'est quelque chose de pur en moi et je crois qu'il en est de même pour le public. Le moment du spectacle est un moment de vie. Tout est fait pour préserver ce moment de vie, pour faire émerger des pensées, engendrer une énergie, une joie… L'Idiot est un roman très, très noir, une sorte d'immense lac noir, une sorte de glu. Mais, dans cette glu, il y a un énorme espoir de guerre. Dans le dernier monologue, le Prince Mychkine dit : « Moi, je parle, je sais que cela ne sert à rien, que vous allez me prendre pour un fou. Ce que je suis est démesuré. Je dois faire trop de gestes ridicules, cela n'a aucun sens, ce n'est pas carré, ce n'est pas bien fait, mais, si je ne parle pas, cela voudra dire que toute notre vie, toute notre existence, notre combat, n'aura pas eu de sens ». Et je trouve que ça,ça parle du théâtre.
Propos recueillis par christophe lemaire



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VINCENT MACAIGNE
Ecriture Mise en sène Conception visuelle & scénographique

Il y a une certaine signature dans les spectacles de Vincent Macaigne au théâtre, ce sont les décibels, la vitesse et le débordement. Ses spectacles laissent généralement acteurs et spectateurs essorés, à bout de souffle, face à un plateau dévasté. Le metteur en scène cherche de cette manière une parole vivante, politique, contemporaine.
Né en 1978, il entre au Conservatoire national supérieur de Paris en 1999. Il monte Friche 22.66, sa première pièce, en 2004, puis Requiem 3, une première version de L'Idiot, et Hamlet, au moins j'aurais laissé un beau cadavre: quatre heures proliférantes et vociférantes au Festival d'Avignon en 2011.
En 2012, il est en résidence à la Ménagerie de verre à Paris où il présente En manque.
Il fait également des mises en scène à l'étranger, au Chili et au Brésil entre autres.
Au cinéma il fait partie de la jeune génération montante.
Comme réalisateur il gagne plusieurs prix pour son premier moyen-métrage et adapte Dom Juan avec la troupe de la Comédie-Française.
Comme acteur on le retrouve notamment dans Tonnerre de Guillaume Brac, La Bataille de Solférino de Justine Triet, La Fille du 14 juillet d'Antonin Peretjatko, Tristesse Club de Vincent Mariette.


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Yukio Ninagawa Texte de Kunio Shimizu

 


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LA PIÈCE : CORBEAUX ! NOS FUSILS SONT CHARGÉS !


Deux jeunes hommes sont jugés dans un tribunal pour avoir lancé une bombe en plein milieu d'un spectacle. Soudain surgissent des dizaines de vieilles femmes armées de bombes, balais, parapluies, luths… Farouchement résolues à sauver leurs petits-enfants, elles tuent des gardes avant d'entamer l'occupation de la salle, sous les yeux effarés des otages. Elles commencent alors à faire le procès des hommes de loi, mais aussi des jeunes qu'elles étaient pourtant venues libérer. Les peines de mort sont prononcées les unes après les autres…
"On a perdu la tête depuis longtemps, la haine nous a rendues folles depuis des centaines, des milliers d'années. On est des corbeaux noircis par la honte de l'homme. Une flûte en os humain et taillée avec des os humains résonne constamment dans notre coeur en poussant des cris déchirants. C'est pour cela qu'on ne peut mourir. On ne peut pas crever tant qu'on ne sait pas ce qu'est cette flûte. Ce que crie la flûte, est-ce le sang, est-ce le sommeil, ou bien un amour insaisissable… On est des corbeaux noircis par la honte de l'homme. Des corbeaux noircis… Vous croyez que ce gamin insignifiant a le droit de repousser notre corps ? Mais pour qui il se prend ! Les principes que tu nous chantes, qu'ils aillent se faire étouffer par notre utérus dont on se sert si bien. Cet utérus qui a su franchir monts et vallées, il est là pour engloutir, étouffer les pourritures comme vous." (Extraits de la pièce)
Kunio Shimizu écrit cette pièce en 1971. Jusqu'alors, il écrivait du point de vue de jeunes refusant le système établi. Avec "Corbeaux ! Nos fusils sont chargés ", une de ses pièces les plus remarquables, il chasse les jeunes des rôles principaux. "Ces vieillardes symbolisent les mots que nos pères et nos mères qui vivaient dans le silence n'ont pas pu formuler. Mais ce qui transperce l'ensemble de ce texte, c'est la tristesse de notre situation actuelle que seules ces femmes âgées peuvent raconter."
Quotidien Asahi Shimbun, 4 octobre 1971



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La création de "Corbeaux ! Nos fusils sont chargés !" eut lieu à Tôkyô, à l'Art Theater, salle culte des amoureux du cinéma d'auteur. La pièce était interprétée par le Gendaijin Gekijô, la compagnie de Yukio Ninagawa, qui avait 36 ans à l'époque. En pleine période contestataire, cette pièce au ton violent montrait la rébellion de femmes âgées refusant l'hypocrisie générale. Lors de la création, c'étaient les jeunes comédiens du Gendaijin Gekijô qui tenaient les rôles des personnes âgées. Mais 35 ans plus tard, pour la reprise de cette pièce en 2006, Ninagawa fit appel à ses comédiens du Saitama Gold Theater. Même si les personnages de la pièce sont âgés, apporter simplement la réalité de corps vieillissants sur le plateau n'était pas suffisant. Le défi était de présenter la vieillesse dans la fiction du théâtre. Les comédiens se préparèrent en assistant à de vrais procès et apportèrent un réalisme poignant à la rage des seniors. La pièce fut jouée à guichet fermé.
"Dans cette pièce, des vieillardes pleines d'énergie jugent des jeunes introvertis et égocentriques qui ne parlent qu'avec les mots des autres. Cette pièce fut ma dernière mise en scène avant de dissoudre ma compagnie Gendaijin Gekijô. En la reprenant, j'ai voulu vérifier que ma capacité à mettre en scène n'avait pas perdu de sa force. Je cherchais une meilleure mise en scène qui ne soit pas influencée par ma notoriété et l'indulgence du public que j'avais acquises entretemps."
Yukio Ninagawa en 2006
"Dans cette nouvelle version du Saitama Gold Theater, jamais nous ne ressentons d'impression d'étrangeté puisque ce sont des personnes âgées qui interprètent les rôles des vieillardes. La vieillesse est ici réaliste, les paroles de colère et de renoncement sont intensifiées par le vécu de chacun. (…) Pour être franc, je considère que cette version surpasse la première. Alors que dans la première création dans laquelle subsistaient l'excitation et le sentiment d'échec des jeunes contestataires des années 70, la version du Gold Theater exprime parfaitement la rage des personnes âgées contre la société actuelle. L'émotion ressentie avec cette version a été encore plus forte pour ceux qui avaient assisté à la création en 1971. Ninagawa a certainement pu réunir, pour la première fois, la distribution idéale pour cette pièce. Du plateau émanait la richesse de l'histoire personnelle de chaque membre du Gold Theater."

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KUNIO SHIMIZU

Né à Nigata en 1936, il publie sa première pièce, Cho meijin, à l'université Waseda et se fait connaître en gagnant le Theatreux Drama Award et le Waseda Drama Award. Après ses études, il rejoint la Iwanami Film Company. À partir de 1965, il s'engage pleinement dans l'écriture. En 1969, il fait sensation avec Shinjo Afururu Keihakusala première production que Yukio Ninagawa met en scène et désormais, il appartient exclusivement au Ninagawa's Gen dai jin-Gekijo et la compagnie Sakurasha. Ensemble, ils travaillent surtout pour les jeunes générations. En 1974, il remporte le Kishida Award pour Bokuraga Hijono Taigawo Kudarutoki. Après la disparition de Sakurasha, il fonde une nouvelle compagnie de théâtre, Kitosha, avec sa femme et actrice, Noriko Matsumoto. Il y joue un rôle très actif en tant qu'auteur et metteur en scène jusqu'à sa dissolution en 2001. Il écrit également pour la radio et la télévision et est nominé pour le prix Akutagawa pour son oeuvre Tsukigatakamawo Kainiiku Tabi. Il reprend une collaboration avec Ninagawa en 1982, il écrit des pièces comme Tango Fuyuno Owarini (Tango à la fin de l'hiver) et Amenonatsu, 30 ninno Juliet ga Kaettekita. Il remporte le Izumi Kyoka Award de Littérature pour Wagatamashiha Kagayaku Mizunari en 1980 et le Yomiuri Award en Litté rature pour Elegy Chichino Yumeha Mau.






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Interprétée par des acteurs âgés de plus de 60 ans, la pièce Corbeaux ! Nos fusils sont chargés ! est un grand spectacle réflexif sur la société japonaise depuis l'après-guerre caché sous une farce tragi-comique.

"Je suis entré dans cette compagnie en 2005 à l'âge de 81 ans. La dernière fois que j'avais fait du théâtre remonte à l'époque où j'en avais 19 ans. À la fin de la Seconde Guerre mondiale, quand le Japon a capitulé, je devins prisonnier de guerre en Chine. Dans le camp, nous avons monté une pièce intitulée Le Jour du retour. J'interprétais le rôle principal, celui d'un jeune Japonais qui rentre dans son pays. Je ne pensais pas que je ferai de nouveau du théâtre".
Hiroshi Kobayashi, acteur

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DES JAPONAIS TONITRUANTS
Avec une verdeur intacte, Yukio ninagawa reprend un spectacle mythique créé à tokyo en 1971.
Dans "Corbeaux ! Nos fusils sont chargés !", trente furies prennent d'assaut le tribunal où sont jugés leurs enfants et petits-enfants. un choc dévastateur !

Au Japon, comme ailleurs, l'histoire du théâtre est ponctuée de spectacles mythiques que l'on rêve d'avoir vus. C'est le cas du tonitruant "Corbeaux! Nos fusils sont chargés !", un spectacle phare des années 1970, qui, à Tokyo, contribua à faire connaître un théâtre underground en marge du théâtre officiel. Ce spectacle nous revient, recréé par ses créateurs, nullement apaisé, et tout aussi sulfureux. La pièce signée par le grand auteur Kunio Shimizu met en scène trente furies, trente vieilles femmes qui font preuve d'un langage qui va droit au but tout en ne dédaignant pas s'offrir de belles envolées lyriques. Une langue tendue, hybride et dévastatrice, mi-ordurière, mi-poétique, admirablement servie et magnifiée par la mise en scène de Yukio Ninagawa et les acteurs de deux troupes qu'il a créées au sein du Saitama Arts Theater dont il est le directeur artistique depuis 2006. D'un côté, les 35 acteurs âgés de 61 à 88 ans du Saitama Gold Theater, de l'autre les 26 jeunes du Saitama Next Theater. Yukio Ninagawa est une sommité, connu dans bien des pays, mais relativement peu en France (il est venu pour la dernière fois en 2002 avec sa mise en scène d'un Shakespeare, Le Songe d'une nuit d'été). Quand la Maison de la culture du Japon a fait venir, au printemps dernier, "Corbeaux ! Nos fusils sont chargés !", ce fut un choc, un éblouissement, et il est apparu évident que ce spectacle devait revenir plus longuement pour être vu par un public plus large. Né en 1935, Yukio Ninagawa est un enfant du Shingeki (nouveau théâtre) qui, au XXe siècle, s'érigea en réaction au Jyugeki (ancien théâtre), celui des formes traditionnelles (Nô, Kabuki, Kyogen), et ouvrit grand la porte au théâtre occidental, de Shakespeare à Brecht en passant par Stanislavski. Mais comme tout enfant doué pourvu d'une forte personnalité, à son tour, avec des complices de sa génération, à commencer par Kunio Shimizu, Yukio Ninagawa contesta la domination du Shingeki en créant sa propre troupe en 1968 et en devenant l'un des fers de lance du mouvement des petits théâtres. Un théâtre contestataire, une écriture (textuelle et scénique) avant-gardiste dont "Corbeaux ! Nos fusils sont chargés !", qui date de 1971, dit bien la teneur. Depuis, Yukio Ninagawa a créé bien des spectacles, reçu bien des prix. "On doit être créatifs malgré la vieillesse", dit-il. Il l'est, - et comment ! – en retrouvant cette vieille et verte pièce, en l'offrant à une troupe de vieux acteurs mis sur pied dans un pays vieillissant. Des vieilles mères et grands-mères en colère et en chaleur envahissent un tribunal qui entend juger leurs enfants ou petits-enfants. Ces derniers, accusés de faits qu'ils ont peut-être commis, apparaissent d'abord comme les victimes d'une justice sourde, vénale et procédurière. Au tour des juges d'être jugés par ce tribunal révolutionnaire de vieilles révoltées qui, pour commencer, demande aux magistrats d'enlever leur pantalon. La suite n'est pas triste non plus. Quelle gifle !


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MÉLANIE LERAY est comédienne, metteuse en scène et auteure. Elle est formée à l'école du Théâtre National de Bretagne de 1991 à 1994. Elle travaille comme actrice avec leThéâtre des Lucioles et Christophe
Lemaître, Jean Deloche, Gilles Dao, François Rancillac, Patricia Allio, Pierre Huyghe…
Au cinéma, elle a tourné avec Manuel Poirier (prix du Jury du Festival de Cannes 1997), Xavier Beauvois, Marion Vernon, Benoît Jacquot, Roch Stephanik, Christophe Jacrot, Pascale Breton, Hubert Grillet, Fred Pell, Jalil Lespert etc. Elle obtient en 2001 le Lutin de la meilleure actrice pour Les filles du 12 de Pascale Breton.
Elle tourne également pour la télévision des films avec
Édouard Niremans, Lou Genet, Hervé Baslé, Jean Lar riaga, Claude D'Anna, Sisser, David Delrieux, Flo -
rence Strauss, P. Poivre D'Arvor, Pascale Dallet…
Elle met en scène au Centre Pénitentiaire de Rennes
avec le TNB, des femmes de la prison et des artistes
extérieurs : Voir et être vu (B. Strauss et Sarah Kane,
2000) et J'étais dans ma maison et j'attendais…
d'après le texte de Jean-Luc Lagarce (2001).
Avec Pierre Maillet, elle met en scène deux pièces :
Automne et Hiver (2004) et La Veillée (2005) de Lars
Norén.
Elle crée au Festival Corps de Texte à Rouen Erma
et moi de Mario Batista (2006), au Théâtre du Rond
Point à Paris La Chaise de Florian Parra (2006) et au
Théâtre National de Bretagne à Rennes deux spectacles
qui rencontrent un grand succès : Leaves de Lucy Caldwell (2009 & 2011) puis Contractions de Mike Bartlett (2012), repris en 2014.

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Petruccio est le premier à laisser Catherine parler et à ne pas craindre de lui donner la réplique. Ensemble, ils parlent librement et il la fait rire, elle le fait rire.
Un des enjeux principaux de la pièce serait-il l'amour ? Pas un amour de surface, d'apparences, mais une véritable complicité d'esprit, une relation d'égale à égal qui, si elle ne peut s'affranchir complètement des codes (le mariage), les renouvelle et permet l'épanouissement et la revanche de ceux qui n'avaient ni la beauté, ni la jeunesse idéale. Mariage arrangé par excellence, couple improbable pris dans le carcan oppressif du mariage vu comme domestication de la femme par l'homme, le couple Petruccio-Catherine a tout pour échouer et rien pour réussir. Pourtant, c'est l'inverse qui se produit, et des trois couples que présente la pièce, c'est le seul qui fonctionne. Cette complicité, cette affection et ce plaisir d'échanger avec l'autre viennent les prendre par surprise et assurent à l'un comme à l'autre un semblant d'être qu'ils ne cessent de rechercher dans leur insoumission au monde.
Avec Delphine Lemonnier-Texier, la traductrice, nous avons veillé à garder au maximum la beauté de la langue tout en s'assurant que l'humour soit bien perceptible. Car, même si au coeur de la pièce l'enjeu est celui du pouvoir, de l'oppression et de la liberté de la femme, La Mégère apprivoisée est une comédie, grivoiseet moqueuse.
Mélanie Leray


WILLIAM SHAKESPEARE

Né à Stratford-on-Avon (Angleterre), probablement le 23 avril 1564 (puis baptisé le 26 avril 1564), William Shakes- peare est considéré comme l'un des dramaturges les plus grands de tous les temps, mais sur qui l'on a le moins de précisions biographiques. Fils de commerçant aisé, il épouse à dix-huit ans Anne Hathaway, mais ne semble pas avoir été heureux en ménage. Nous perdons ensuite la trace de Shakespeare pendant près de dix ans.
On ne sait rien de ce qu'il fit au cours de cette période, mais l'on sait qu'il quitta Stratford pour rejoindre Londres (sans doute vers 1587), et que sa femme accoucha de plusieurs enfants : Susanna, en mai 1583 ; ainsi que des jumeaux, Hamnet et Judith, en février 1585 (Hamnet mourut jeune, en août 1596).
Shakespeare trouve du travail dans un théâtre et révèle son talent en « arrangeant » des pièces achetées aux auteurs. Il prend les dramaturges de son époque tels que Marlowe, Greene et Peele comme modèles.
Peines d'amour perdues (1590?) est considéré comme sa première pièce originale, suivie de plusieurs poèmes galants (Vénus et Adonis, Le Viol de Lucrèce).
Le poète conquiert l'amitié de ses camarades et la bien- veillance des grands seigneurs, et surtout l'estime de la jeune reine Elisabeth I qui marque pendant toute sa vie une préférence pour l'oeuvre de Shakespeare. Il entame sa carrière en reprenant des pièces à sujet historique, puis compose des pièces inspirées de l'Antiquité. Un autre "groupe" de pièces est celui des tragédies, parmi lesquelles figurent en tête Roméo et Juliette (1595), puis Hamlet (1602), Othello (1604), le Roi Lear (1606) et Macbeth (1606).
La Tempête (1611), est considérée comme la dernière pièce de l'auteur qui se retire à Stratford, riche et apaisé, à l'âge de quarante-sept ans.
La fin de vie de Shakespeare est un peu agitée : assigné en justice pour avoir clôturé ses terres, privant de revenus de nombreux paysans, on accuse son futur gendre d'avoir eu des relations sexuelles avec une autre personne que Judith, sa fiancée.
Shakespeare meurt à l'âge de 52 ans.
Des trente-sept pièces qui lui sont attribuées, seize
seulement furent publiées de son vivant. Notons que deux oeuvres ne sont pas parvenues jusqu'à nous : Peines d'amour et peines gagnées (mais il s'agit peut-être d'un autre nom de la pièce Beaucoup de bruit pour rien), et Cardenio, une pièce composée en collaboration avec un autre auteur.
Enfin, il existe des textes, écrits au xVIIe siècle, dont
Shakespeare est peut-être l'auteur, mais nous n'en avons aucune preuve. Certains érudits ont contesté l'existence de Shakespeare, y voyant un prête-nom pour quelque grand seigneur ou bien attribuant à Bacon la paternité, alors qu'aujourd'hui on croit généralement au vrai Shakespeare.




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