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Pour
vos sorties, quelques sites intéressants... |
Théâtre
de la Ville, Place du Chatelet, Paris
http://www.theatredelaville-paris.com/
Théâtre
du Rond-Point, 2 Bis av Franklin D Roosevelt, Paris
http://www.theatredurondpoint.fr/
Théâtre
de la Colline, 15 rue Malte-Brun, Paris
http://www.colline.fr/
Théâtre
du Soleil, Cartoucherie, Vincennes
http://www.theatre-du-soleil.fr/
Théâtre
de l'Odéon, Place de l'Odéon, Paris
http://www.theatre-odeon.fr/
Opéra
de Paris
http://www.operadeparis.fr/
Théâtre de la Commune, Aubervilliers
https://www.lacommune-aubervilliers.fr/
Miettes
de Margoula
https://www.miettesdemargoula.fr/
Comédie Française
https://www.comedie-francaise.fr/
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Pour comprendre le théâtre... |
Quelques
livres à (re)découvrir... |
Stanislavski
: La formation de l'acteur
"On peut emprunter un manteau, des
bijoux, n'importe quel objet, mais on ne peut prendre
à un autre ses sentiments."
Bertolt Brecht : Petit organon pour le théâtre
"La tâche principale du théâtre
est d'expliciter la fable et d'en communiquer le sens
au moyen d'effets de distanciation appropriés."
Manfred Wekwerth : La Mise en scène dans le théâtre
d'amateurs
"Malheur au metteur
en scène non professionnel qui moulerait les
mille propositions naïves de ses interprètes
dans les formes usées de la routine théâtrale."
Antonin Artaud : Le théâtre et son double
"Et ce que le théâtre peut encore
arracher à la parole, ce sont ces possibilités
d'expansion hors des mots, de développement dans
l'espace, d'action dissociatrice et vibratoire sur la
sensibilité."
Jerzy Grotowski : Vers un théâtre pauvre
"Libérer la
voix, ce n'est pas travailler avec l'appareil vocal
en fixant son attention sur lui, mais il faut au contraire
travailler comme si le corps chantait, le corps parlait."
Peter Brook : L'espace vide
"Je peux prendre n'importe
quel espace vide et l'appeler une scène. Quelqu'un
traverse cet espace vide pendant que quelqu'un d'autre
l'observe, et c'est suffisant pour que l'acte théâtral
soit amorcé."
Denis Diderot : Paradoxe sur le comédien
"La larme qui s'échappe
de l'homme vraiment homme nous touche plus que tous
les pleurs d'une femme."
Augusto Boal : Théâtre de l'opprimé
xxxxxxxxxxxxxxxx Jeux
pour acteurs et non-acteurs
"Le théâtre n'est pas
seulement un événement, c'est un mode
de vie !"
A suivre... |
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Mais qu’est-ce qui est arrivé au grand Macbeth, ce général victorieux à la carrière brillante ? Un bel homme, aimé des siens, respecté, admiré, comblé d’honneurs mérités, salué par le roi. Il avait tout pour être heureux. Une femme aimante, distinguée comme une noble romaine. Un château magnifique. Et quel beau paysage ! Tout lui souriait.
Et voilà que du jour au lendemain, une ténèbre – tombe. C’était le lundi qui suivait le triomphe. Ça ne peut quand même pas être la faute des vieilles sorcières prophétiques ? C’est comme si l’avenir s’était jeté sur lui et lui avait mordu le cerveau avec ses dents empoisonnées. Comme si un télégramme du diable était arrivé. Un mot : Tue ! Une idée horrible vient frapper à la porte de sa pensée. Pensée ? Même pas. C’est comme si la peste avait frappé à la porte de son château. Une seconde d’hésitation. Une seconde ? Même pas. C’est comme s’il avait déjà ouvert la porte avant d’ouvrir. Comme si quelqu’un avait précédé son mouvement. Sa femme ?
À la seconde, il y a eu ce besoin foudroyant de faire ce qu’on ne doit pas faire, et, subitement, ce qu’on ne peut pas faire, on le fait. Fait. Et déjà tout est ruiné et décomposé : la raison, le cœur, le sentiment, la nourriture, le sommeil. On ne peut plus ni dormir, ni se réveiller. Le temps n’a plus de passé ni de présent. Il est sans repos et sans retour. La première seconde lui a été fatale, on ne peut plus qu’aller de l’avant dans le sang, dans le sang, descendant dans le sang.
Le grand Dérangement a envahi le monde. Ce qui vit n’est pas vivant. Ce qui est mort n’est pas mort. Les rêves chassés de leur région errent à l’extérieur en hallucinations. Tout est perdu, l’amitié, la confiance, l’épouse, les illusions, le goût. Même la peur le quitte.
Et le peuple, dans cette histoire ?
Le peuple ? Ah ! Oui ! C’est vrai. D’habitude, comme dans les pièces de Shakespeare, quand il y a un pays, il y a aussi un peuple. Le peuple, les Macbeth n’y avaient jamais pensé ! Toutes leurs forces, affairées, tendues vers ce petit objet maléfique : la couronne. Tout l’espace du cœur est occupé par le terrible désiré. Jamais on n’avait vu une telle pureté dans le mal, une telle passion dans la tentation, nous semble-t-il.
Nous ? Nous, les oubliés, les rejetés, nous sommes saisis d’effroi et d’incompréhension. Comment en arrive-t-on là, c’est-à-dire au-delà de tout plaisir, de toute satisfaction, là où la fin est sans arrêt et la langue se vomit elle-même ? Le mal est juste derrière la porte. Vous l’entendez hurler. Macbeth n’aurait jamais dû penser à ouvrir la porte. Trop tard frappe comme la foudre.
Attention ! Nous ne devrions jamais laisser les Macbeth ouvrir la porte, pensons-nous. Le mal est prêt. Il n’attend que cet instant. Attention ! Le mal est sans arrêt. Vous êtes prévenus ?
Hélène Cixous, 1er février 2014 |
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Trente ans après avoir débuté son cycle shakespearien en Avignon, Ariane Mnouchkine revient à l’hybris de l’auteur anglais en s’ancrant dans un présent aux contours flous. D’une tente militaire en Irak en passant par un ordinateur portable délivrant le second oracle au rôle éponyme, la metteur en scène multiplie les détails référentiels renvoyant à notre modernité. Les papparazades incessantes des journalistes avec leurs flashs crépitants évoquent en clin d’œil malicieux Lady Di dans un décor so British masquant mal l’hypocrisie d’un couple ravagé par des pulsions meurtrières. Le coup de génie de Mnouchkine se distingue par sa dénonciation au vitriol du poids des canaux d’information à l’heure de l’hyperconnectivité mondiale. La férocité voyeuriste de la presse à scandale participe à l’aliénation du duo machiavélique en augmentant leur mégalomanie. |
Du château où Macbeth assassine son invité, le roi Duncan, on ne se fait pas une image très riante. La nuit du meurtre est traversée de bruits sinistres - pluie, tonnerre, fenêtres qui claquent, cris d’oiseaux - couvrant à peine les hurlements du souverain égorgé. Le réveil est encore plus brutal, avec la série de coups frappés à la porte pour tirer du lit le portier qui cuve son vin. Une maison de l’épouvante dans les ténèbres.
Dans la mise en scène d’Ariane Mnouchkine, la première image du château est à l’opposé de ces horreurs. Lady Macbeth veille sur une vaste roseraie dont l’odeur se répand dans la salle. Avec son grand tablier, le jardinier est un débonnaire qui rassure ; les servantes font des bouquets. «Au fond, disait Mnouchkine à ses comédiens au début des répétitions - citation reprise dans le programme -, la pièce commence dans une gloire, pendant une victoire, tout devrait aller bien, tout est doux, c’est comme cela que c’est décrit au début. Ça ne commence pas dans un monde terrible.»
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Pour le cinquantième anniversaire du Théâtre du Soleil, Ariane Mnouchkine a étrangement choisi de monter Macbeth, de Shakespeare, la tragédie du mal absolu. Celle qui depuis le 29 mai 1964 défend avec sa troupe un théâtre épique, historique, capable de réenchanter le monde en donnant au public l'énergie, l'émerveillement nécessaires pour mieux le penser, l'affronter, s'est donc immergée en enfer depuis des mois. Sans doute parce qu'à 75 ans la généreuse et indomptable patronne du Soleil ne cesse de vouloir comprendre les cancers qui rongent nos sociétés, ce qu'il y a derrière les ambitions effrénées de pouvoir, les faims d'argent insatiables. Et si c'était on ne sait quelle puissance obscure et funeste tapie au fond de nous ? Shakespeare (1564-1616) s'en empara comme personne avant lui, à travers les figures du valeureux Macbeth et de son élégante lady, plongés sans jamais y résister dans la spirale stupéfiante du meurtre et du sang. Jusqu'à massacrer sans regret vieillard, femmes et enfants innocents, tous ceux qui les éloignaient de ce trône promis un soir par trois sorcières. Jusqu'à déranger par leurs crimes l'ordre de la vie même, qui n'est selon Macbeth « qu'une ombre en marche, un pauvre acteur qui sur scène se pavane et se ronge pendant son heure/Et puis qu'on n'entend plus : c'est une histoire contée par un idiot, pleine de bruit et de fureur. Et ne signifiant rien. » Macbeth prétend alors tuer le sommeil, massacrer la pensée. Et finit par faire marcher les forêts... Le chaos que met en scène Shakespeare est si radical qu'on a longtemps cru que sa pièce portait malheur, et qu'Ariane Mnouchkine elle-même l'appelle plus volontiers « la tragédie écossaise » qu'elle n'aime à la nommer. |
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Artiste avant-gardiste, Robert Wilson est né à Waco (Texas) en 1941. Diplômé en architecture au Pratt Institute en 1965, il fonde en 1968 sa troupe de théâtre, la Byrd Hoffman School of Byrds. Il crée ses premières pièces The King of Spain et The life and times of Sigmund Freud puis exporte son théâtre expérimental sur les scènes européennes. Il fait sa première apparition en France en 1971 avec « le regard du sourd ». En 1976, il obtient une reconnaissance mondiale avec Einstein on the Beach qu’il cosigne avec Philip Glass.
Il collabore également avec d’autres musiciens comme David Byrne, Tom Waits et Lou Reed. La majorité de ses spectacles naissent dans son laboratoire, le Watermill center, vaste complexe artistique fondé en 1992.
Egalement peintre et sculpteur, Robert Wilson a exposé dans les musées et galeries du monde entier.
Honoré de nombreux prix et distinctions, Robert Wilson est notamment « Commandeur des arts et des lettres » et a reçu un Lion d’or en sculpture à la Biennale de Venise, en 1993. |
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« Je crois avant tout en un théâtre formel. (…) Mes textes ne cherchent pas à raconter une histoire, mais ils sont construits comme d’authentiques partitions musicales. Tous les gestes des personnages ont une numérotation, tous les rythmes des lumières et des actions sont calculés à la seconde près, comme dans une partition où convergent lumière, son et action» (Robert Wilson) |
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Kurt Weill / Bertolt Brecht
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Inspiré de L’Opéra des Gueux de John Gay (1728), l’ouvrage a été créé à l’été 1928 à Berlin. Fort de son succès à la scène, la pièce est portée à l’écran par le cinéaste allemand Pabst trois plus tard. Depuis, la popularité de L’Opéra de quat’sous ne s’est jamais démentie et la partition de Kurt Weill n’a cessé d’inspirer les plus grands noms du théâtre européen.
Depuis 2006, des liens forts unissent le Théâtre de la Ville et le Berliner Ensemble. L’Opéra de quat’sous mis en scène par Robert Wilson y a été joué en 2009 puis 2010. Ce fut un véritable choc théâtral où d’emblée on était impressionné par la couleur « berlinoise » de ce cabaret grinçant peuplé de personnages grimés à outrance à la façon de la peinture expressionniste allemande. Et pourtant, s’y dessinait aussi très clairement la « patte » de Bob Wilson, dans cette science de l’épure et des lumières dont il est un maître absolu. Un décor géométrique abstrait, des jeux de néons et un majestueux rideau rouge abolissent les frontières. Le plateau devient alors une véritable œuvre d’art d’une « inquiétante étrangeté ».
Chant, lumières, musique (assurée par une dizaine de musiciens dans la fosse) et sons divers (formidable travail sur les bruitages) dialoguent avec une véritable grâce et une incroyable limpidité dramatique. Un mélange onirique de cinéma muet, d’art expressionniste, de cirque, de music-hall et une musique où se côtoient jazz, chanson et opéra. L’ouvrage s’apparente à une satire de la bourgeoisie corrompue. Si elle trouve sa source originelle dans l’Angleterre victorienne, Bob Wilson transcende l’enjeu social par une peinture machiavélique et haute en couleurs. Le « Théâtre de la vie » est finalement le plus fort, semble-t-il nous dire. Un opéra diablement théâtral |
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C’est d’abord une troupe fondée par Bertolt Brecht et Helene Weigel en 1949, après la création de Mère Courage. En 1954 il s’installe à son siège actuel, le Theater am Schiffbauerdamm.
Se succèderont à sa tête après la mort de Brecht en 1956, Helene Weigel, Ruth Berghaus, Manfred Wekwerth, puis une direction collective (Matthias Langhoff, Fritz Marquardt, Heiner Müller, Peter Palitzsch et Peter Zadek).
C’est en 1999 que Claus Peymann, après avoir dirigé le Schauspielhaus de Bocheum et le Burgtheater de Vienne, prend la direction du Berliner Ensemble. Il mettra d’abord l’accent sur la création de texte contemporains et de classiques revisités, parmi lesquels Richard II de Shakespeare. Il montera ensuite plusieurs pièces de Brecht et invitera de nombreux metteurs en scène à travailler avec la troupe : Robert Wilson, Peter Stein, Luc Bondy, etc…
Le théâtre contemporain allemand occupe aujourd’hui une place centrale au Berliner Ensemble, avec des pièces d’Elfriede Jelinek, Peter Handke et Albert Ostermaier. |
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Kurt Weill est surtout connu en Europe comme le compositeur de la musique de L’Opéra de Quat’sous (1928) et de Grandeur et Décadence de la Ville de Mahagonny (1927) de Brecht.
Weill fut le musicien de théâtre allemand le plus célèbre de la République de Weimar. Chassé d’Allemagne par le national-socialisme, les œuvres qu’il composa en Amérique influenceront tout le style de Broadway.
Le succès de ses premières symphonies est à l’origine de sa collaboration avec des auteurs de théâtre. En 1924, il fait la connaissance de l’actrice viennoise Lotte Lenya, qu’il épouse en 1926. Inoubliable interprète de Jenny dans L’Opéra de Quat’sous, elle contribuera largement à la popularité de ses chansons.
De sa rencontre avec Brecht naissent des œuvres d’une rare audace artistique. L’étrangeté de la musique de Weill, marquée à la fois par l’influence de Busoni, du jazz et de Gershwin, complète admirablement l’ironie insolente des chansons de Brecht et est à l’origine de leur succès. Avec le film de Pabst, dans sa double
version allemande et française, les airs de L’Opéra de Quat’sous, et notamment la « Ballade de Mackie Messer », font le tour du monde.
Ses oeuvres – en particulier Mahagonny – sont violemment attaquées par les nazis qui qualifient Weill de « musicien judéo-négroïde ». Réfugié en Amérique, il travaille avec le New Yorker Group Theatre, puis avec Fritz Lang.
Les liens qu’il noue avec Maxwell Anderson, Elia Kazan, Ira Gershwin... l’amènent à collaborer avec les théâtres de Broadway. Les comédies musicales qu’il compose sont devenues des classiques du théâtre américain.
Admirablement interprétées par Lotte Lenya, ses chansons comptent parmi les plus belles compositions des années quarante. |
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Ivo van Hove est né en 1958 en Belgique. Après ses débuts en Belgique, il devient directeur de la compa gnie du Zuidelijk Toneel, aux Pays-Bas.
Ses mises en scènes d'India Song de Marguerite Duras, et de Caligula d'Albert Camus, sont particulièrement remarquées.
Ivo van Hove adapte des films pour la scène, monte des opéras, participe à plusieurs festivals, dont celui d'Édimbourg. Il met en scène des oeuvres de John Cassavetes, Pier Paolo Pasolini, Jean Genet ou Anton
Tchekhov. Il collabore avec le Théâtre de Hambourg ou le Nederlandse Opera (Lulu d'Alban Berg, L'Affaire Makropoulos de Leos Janácek).
De 2001 à 2004, il assume la direction du prestigieux Toneelgroep Amsterdam, une des compa gnies théâtrales européennes les plus inventives. Il en renforce la pluridisciplinarité, invitant à s'y produire des artistes comme Christoph Marthaler, Pina Bausch, Peter Sellars…
À l'Opéra des Flandres, il entame, en 2006, une version résolument moderne de la Tétralogie de Richard Wagner, à raison d'un opéra chaque saison.
En 2008, au Festival d'Avignon, Ivo van Hove présente Tragédies romaines, regroupant les trois pièces de William Shakespeare: Coriolan, Jules César et Antoine et Cléopâtre.
En 2010, il met en scène une version transposée dans un monde contemporain avec une esthétique trash du Misanthrope de Molière à la Schaubühne de Berlin intitulée Der Menschenfeind accompagnée d'une nouvelle traduction allemande du texte.
En 2014, il dirige la création mondiale de Brokeback Mountain de Charles Wuorinen au Teatro Real.
En juillet 2014, au Festival d'Avignon, il met en scène The fountainhead (La Source vive).
Du 26 au 28 mars à la Maison des Arts de Créteil, il mettra en scène Mary Stuart de Friedrich Schille avant de créer Antigone de Sophocle, présenté au Théâtre de Luxembourg, au Barbican de Londres et au Théâtre de la Ville. |
Extrait des dossiers pédagogiques |
Extraits vidéos |

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Antigone refuse que son frère Polynice soit érigé en bouc-émissaire et dépeint tel un monstre inhumain.
Elle s'obstine à le défendre et à laver son nom du déshonneur, faisant preuve d'une impitoyable passion dans la défense du respect de l'individu et des lois « non-écrites ». À Thèbes, où la société n'apprécie guère ses efforts, il n'y a pas de place pour son amour absolu. Peu importe, Antigone ne vacille pas.
Elle crache un « Non » résolu à la face du monde politique et des lois du pays. Fille issue de l'union incestueuse entre le roi OEdipe et Jocaste, elle est l'incarnation même de l'interdit. Antigone est le défi personnifié : elle est le « Non ». En suivant son coeur, elle détruit une nation entière. L'Antigone de
Sophocle est aussi explosive qu'une bombe nucléaire. C'est l'exploration du bien et du mal au sein de l'esprit humain aux prises avec une situation de crise. Antigone montre à quel point la raison peut être déraisonnable.
En cherchant une pièce pour notre première collaboration,
Juliette et moi étions très vite d'accord pour dire qu'Antigone serait le challenge artistique idéal pour nous deux. La pièce en elle-même a la force explosive d'une bombe nucléaire. Elle traite tous les cas de figure relationnels : homme contre
femme, politique contre éthique, raison d'état contre raison individuelle, famille et les lois du sang.
Antigone devrait résonner au plus profond de chacun. Il me semble tout à fait naturel qu'une telle production se réalise dans un contexte de partenariats internationaux avec le Barbican, Luxembourg et mon propre Toneelgroep Amsterdam. Il est très important que des collaborations d'envergure voient
le jour en ces temps où les gens ont tendance à se cloisonner derrière leurs propres frontières. L'art peut changer le monde ! |
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Sophocle est né à Colone en 496 avant Jésus-Christ, à Colone, près d'Athènes. Il reçoit une éducation solide, en particulier en musique et en gymnastique. Il meurt à 90 ans sans n'avoir jamais quitté sa ville. Il est l'un des trois grands tragiques grecs, avec Eschyle et Euripide. Il commence à écrire en 468 avant JC, ses premières pièces rencontrent un succès critique immédiatement. Il remporte le premier prix de théâtre grâce à sa trilogie.
On a recensé sous son nom plus de 120 pièces, mais seules 8 nous sont parvenues. Il a une place importante dans la vie de sa ville où il y tient des fonctions publiques en parallèle de son travail d'auteur. Il a été hellénotame (personne en charge de la collecte
des impôts au profit de la ligue de Délos) puis stratège auprès de Périclès. Sophocle poursuit cette règle: « Tout lui est bon qui enrichit son expérience sans gêner sa liberté d'artiste. »
(Sophocle, Théâtre complet, p. 9)
La grande innovation théâtrale qu'il apporte est l'abandon des tragédies liées. Il approfondit l'aspect psychologique de ses personnages, ses héros étant confrontés à des problèmes d'ordre moraux, qui fondent la situation tragique. Il pose une certaine
distance avec les influences divines, bien qu'elles soient encore présentes. Enfin, il ajoute un troisième acteur qui permet d'enrichir les interactions entre les personnages. Il apporte un décor peint et augmente le nombre de choreutes. Il écrit également un traité sur le choeur, faisant évoluer son rôle.
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BRIGITTE JAQUES-WAJEMAN
Formée dans les classes d'Antoine Vitez, elle travaille en
tant que comédienne dans plusieurs de ses spectacles de
1969 à 1974. En 1974, dans le cadre du Festival d'Automne,
elle réalise sa première mise en scène en créant, pour la
première fois en France, la version intégrale de L'Éveil du
printemps, de Frank Wedekind, dans une nouvelle traduction
de François Regnault.
En 1976, elle fonde, avec François Regnault, la Compagnie Pandora, qui devient le Théâtre de la Commune-
Pandora au Centre dramatique national d'Aubervilliers lors de sa nomination à la direction en 1991 jusqu'en
1997.
Puisant dans les répertoires classiques et modernes, elle a mis en scène plus d'une trentaine de pièces
présentées lors de festivals et dans de nombreux théâtres, en France et à l'étranger (Comédie-Française,
Chaillot, Odéon, Athénée, Théâtre de la Ville,…). Ayant le souci de la langue et, particulièrement, de la
langue versifiée, Brigitte Jaques-Wajeman s'emploie à révéler la dimension charnelle, sensuelle, des mots.
Pierre Corneille étant son auteur de prédilection, elle monte neuf de ses textes. |
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L'alexandrin n'est pas un problème de race, ni de
classe, ni de mode, ni de musée. Il est la solution qu'a
trouvée la langue française depuis le XIIe siècle, et le
vers par excellence du théâtre à partir du XVIe siècle
jusqu'à Victor Hugo et même Rostand, pour émettre
dans l'espace assez large de douze syllabes le plus grand nombre possible de groupes de mots conformes à la grammaire française.
L'étendue de l'alexandrin permet de combiner de bien
des façons possibles le nombre de groupes de mots
de la langue (groupes syntaxiques) et le nombre de
mots simples (mots lexicaux). Ainsi :
« Mais vous ne savez pas ce que c'est qu'une femme. »
[Corneille, Polyeucte : 12 mots]
« La prostitution, l'adultère, l'inceste. » [Corneille,
Polyeucte : 6 mots]
L'alexandrin traite et résout un problème qui se pose
toujours dans la langue française vivante. La diction
présentement effectuée par les acteurs de Polyeucte
prétend rencontrer cette modernité et y contribuer. |
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Polyeucte, saint ou héros ? |
Polyeucte est joué en 1643 quelques mois après Cinna. Malgré l'admiration que la pièce suscite, elle déclenche dès sa création une querelle qui continuera longtemps, concernant les choix du sujet et du personnage. En effet, beaucoup de contemporains estiment que les questions religieuses sont trop graves pour que des profanes s'en emparent, surtout par le moyen du théâtre, considéré comme un danger pour les esprits. Il faut orienter la littérature vers des sujets qui ne blessent pas les susceptibilités religieuses !
Mais comme toujours, à sa façon, Corneille défend la liberté de l'auteur dont le secret consiste dans « l'ingénieuse tissure des fictions avec la vérité ». Il s'est saisi de l'histoire d'un martyr inconnu, qui apparaît dans les débuts du christianisme et dont beaucoup, nous dit-il, avec humour, « ont plutôt appris le nom à la Comédie qu'à l'Église. »
Beaucoup considère que ce martyr ressemble plus à un héros, un chef de guerre tel qu'Horace, qu'à un saint, tel que Jean de La Croix, par exemple. Son baptême, qui a lieu hors de la scène a fait de Polyeucte un combattant radical, qui dissimule à sa femme sa conversion et sa décision de briser les idoles romaines afin d'imposer de manière éclatante le dieu unique des chrétiens. Plus qu'un chrétien qui se prépare à son martyre, Polyeucte se comporte comme un héros qui cherche, au prix de sa vie, une gloire à nulle autre pareille !
Il y a peu de différence entre les discours d'Horace et celui de Polyeucte :
Horace « Mourir pour son pays est un si digne sort
Qu'on briguerait en foule une si belle mort »
Polyeucte « Si mourir pour son prince est un illustre sort,
Quand on meurt pour son Dieu, quelle sera la mort ! »
Pour l'un et l'autre, le désir de faire un exemple indépassable par leur sacrifice est le même. Un même narcissisme les caractérise : La religion a remplacé le patriotisme d'Horace. |
« Ce zèle est trop ardent… » |
Destructeur d'idoles, martyr prêt au sacrifice pour faire triompher le seul vrai Dieu à ses yeux : pour brigitte Jaques-Wajeman, le Polyeucte de corneille est d'une "grande actualité".
"Je ne crois que les histoires dont les témoins se feraient égorger". Pascal
"Les martyrs furent un grand malheur dans l'Histoire : ils séduisirent". Nietzsche
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PIERRE CORNEILLE
Pierre Corneille, né à Rouen le 6 juin 1606 et mort à Paris le 1er octobre 1684, est un dramaturge français, frère de Thomas Corneille. Ses pièces les plus célèbres sont Le Cid, Cinna, Polyeucte et Horace. La richesse et la diversité de son oeuvre reflètent les valeurs et les grandes interrogations de son époque.
Aîné des six enfants d'une famille aisée de magistrats
rouennais, Pierre Corneille entame en 1624 une carrière d'avocat à Rouen. C'est alors qu'en 1628 son père lui achète deux offices d'avocat du roi au siège des Eaux et Forêts et à l'amirauté de France. Il prend ses fonctions le 16 février 1629. En 1629, un chagrin amoureux le conduit à écrire ses premiers vers, puis sa première comédie, Mélite. Avec les pièces qui suivront : Clitandre, La Veuve, La Galerie du Palais, La Suivante, La Place Royale, Médée et L'Illusion comique, apparaît un nouveau style de théâtre où les sentiments comiques ou tragiques sont mis en scène pour la première fois dans un univers plausible, celui de la société contemporaine.
En 1641, il épouse Marie de Lampérière, fille du lieutenant particulier des Andelys, avec qui il aura sept
enfants dont un mort une semaine après sa naissance.
Corneille, auteur officiel nommé par Richelieu, rompt
avec ce statut de poète du régime et avec la politique
contestée du cardinal, pour écrire des pièces exaltant
la haute noblesse (Le Cid, oeuvre aujourd'hui univer -
sellement connue), rappelant que les hommes politiques
ne sont pas au-dessus des lois (Horace), ou montrant un monarque cherchant à reprendre le pouvoir autrement que par des représailles (Cinna).
En 1647, il est élu à l'Académie française au fauteuil
14 qu'occupera son frère et collaborateur occasionnel Thomas après sa mort. De 1643 à 1651, après la mort de Richelieu, et durant la période de la Fronde, la crise d'identité que traverse la France se retrouve dans l'oeuvre de Corneille: il règle ses comptes avec Richelieu dans La Mort de Pompée, donne une tragédie de la guerre civile avec Rodogune et développe le thème du roi caché dans Héraclius, Don Sanche et Andromède, s'interrogeant
sur la nature même du roi, subordonné aux vicissitudes
de l'histoire, en lui faisant ainsi gagner en humanité.
À partir de 1650, ses pièces connaissent un succès moindre, et il cesse d'écrire pendant plusieurs années
après l'échec de Pertharite. Ce n'est qu'à la toute fin des années 1650 que le vieux poète renoue avec la scène avec la tragédie OEdipe.
Corneille continue à innover en matière de théâtre
jusqu'à la fin de sa vie, en montant ce qu'il appelle une
« pièce à machines », c'est-à-dire privilégiant la mise en scène et les « effets spéciaux » (La Toison d'or), et en s'essayant au théâtre musical (Agésilas, Psyché). Il aborde aussi le thème du renoncement, à travers l'incompatibilité de la charge royale avec le droit au bonheur (Sertorius, Suréna).
À partir des années 1660, l'étoile montante du théâtre
français s'appelle Jean Racine, dont les intrigues misent davantage sur le sentiment et apparaissent moins
héroïques et plus humaines. La comparaison avec Racine tournera au désavantage de Corneille lorsque les deux auteurs produiront presque simultanément, sur le même sujet, Bérénice (Racine) et Tite et Bérénice (Corneille). À la fin de sa vie, la situation de Corneille est telle que Boileau demande pour lui une pension royale qu'il obtient de Louis XIV. |
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